Retours sur une troisième année de jumelage au collège Anna Marly (2021-2022)

Le jumelage de l’ensemble Sillages avec le collège Anna Marly s’achève avec une troisième année consacrée à des ateliers de création proposés aux élèves par le compositeur en résidence Jonathan Bell, les professeur.e.s encadrant.e.s du collège Liouba Wasiutek (musique) et Manuel Cortella (arts plastiques), la tutelle de de la proviseure Marie Faccenda, et la médiatrice de l’ensemble Marie Bouchier.

L’ensemble Sillages adresse de chaleureux remerciements aux intervenants extérieurs Henri-Pierre Deroux, plasticien, et Emmanuel Bonnardot, musicien et fondateur de l’ensemble Obsidienne, mais surtout à tous.te.s les élèves qui se sont prêté.e.s avec intérêt et/ou patience aux expériences que nous leur avons proposé.e.s.

L’ensemble Sillages se consacre aux chemins de l’écriture sonore. Proposer des ateliers de création, c’est ainsi inviter les élèves à se saisir d’abord d’outils d’écriture, et surtout à les accompagner dans un espace où elles/ils s’autorisent à créer, à inventer, à se rendre compte que les outils, les codes, et les lignes peuvent bouger.

Ainsi, Jonathan Bell a passé trois semaines au collège Anna Marly avec à chaque fois quatre classes de trois niveaux différents.

Retour de Jonathan Bell sur les ateliers

Les élèves de 6ème ont travaillé la question de l’instrumentarium, les élèves de 5ème celle de la notation musicale, ceux de 4ème celle de la synchronisation de la musique à l’image, puisque le ciné-concert est une forme affectionnée par l’ensemble.

En-dehors de ce parcours, quelques outils de réflexion sur la critique musicale ont été développés pour les élèves de 3ème, qui ont été accompagnés par leur professeur de musique Liouba Wasiutek au Grand Prix Lycéen des Compositeur.ice.s 2021.

Chaque semaine s’est clôturée par une restitution filmée du travail réalisé, qui a été diffusée à l’occasion de la huitième édition du festival Électrocution de l’ensemble Sillages.

Nous partageons ici les versions longues des vidéos de ces vidéos de restitution, ainsi que quelques explications sur le déroulé des ateliers :

INVENTER SON INSTRUMENTARIUM – élèves de 6ème

Atelier « Inventer son instrumentarium  » réalisé avec les élèves de 6ème
© La Rocade

L’atelier « inventer son instrumentarium » part du principe qu’écrire une musique nécessite comme premier pas d’entendre un son, et de choisir de le fixer sur papier. C’est pourquoi les élèves ont d’abord été invité.e.s à explorer les timbres d’instruments qu’ils ont d’abord imaginé sur papier, puis cherché à transposer sous forme de maquette à partir de matériaux de récupération.

Le processus d’imagination, de conception et de lutherie initial ont été supervisés par leurs professeurs Liouba Wasiutek et Manuel Cortella, et par le plasticien Henri-Pierre Deroux. Celui-ci a ensuite exposé ses propres œuvres au collège aux côtés de celles des élèves.

Un instrumentarium de jeu à partir de ce premier travail a été défini pour l’atelier par Jonathan Bell et Henri-Pierre Deroux. Ce dernier a réalisé une trentaine d’instruments de chaque espèce (violons, psaltérions, cloches, grognons…) pour que les élèves puissent former un petit orchestre.

Jonathan Bell a ensuite guidé les élèves pour définir une typologie sonore des possibilités de chaque instrument, définir une ligne d’écriture pour chaque instrument, et placer les occurrences et le mode de jeu sur cette ligne.

Les élèves ont chacun.e écrit une partition individuelle sur une page. Toutes ces pages rassemblées et mises bout à bout ont créées une partition collective que les élèves ont pu interpréter avec les instruments réalisés par Henri-Pierre Deroux mais imaginés par elles/eux.

ressources complémentaires :

article Inventer son instrumentarium, aux prémices de la création
article Vernissage de l’exposition « Inventer son instrumentarium »

ARS NOVA, LA NOTATION MUSICALE, FACTEUR DE MODERNITÉ ? – élèves de 5ème

Atelier « ARS NOVA, la notation musicale comme facteur de modernité » réalisé avec les élèves de 5ème
© La Rocade

L’atelier “Ars nova / Composition” vise à sensibiliser les élèves à la dimension créatrice des systèmes de notation employés dans l’écriture sonore. La notation permet de conceptualiser et donc d’inventer un langage, qui imprime lui-même sa forme particulière à la musique qu’il traduit. L’évolution des outils d’écriture a une influence directe sur la forme de pensée qui se construit à travers eux. 

Noter c’est dessiner, c’est marquer des repères, c’est donc créer une carte, un chemin, le moyen de transmission d’un esprit à un autre. 

Au moment où Philippe De Vitry écrit le Roman de Fauvel, qui correspond à l’apparition en musique du traité d’Ars Nova, qui se distingue de l’Ars Antiqua, apparaît un système cartésien très précis pour noter le temps. Le système de notation de l’Ars Nova permet donc d’écrire des musiques plus complexes du point de vue de la polyrythmie et de la polyphonie. 

Le compositeur en résidence de l’ensemble Sillages, Jonathan Bell, pousse ses recherches sur les nouvelles technologies musicales du côté de la notation distribuée. Cet outil de mise en ligne et en réseau des partitions ouvre de nouvelles voies à la création, dans l’écriture, l’interprétation des œuvres, mais aussi comme nouvel outil de transmission d’œuvres polyphoniques et de musique modale. 

L’ensemble Sillages a invité le musicien Emmanuel Bonnardot, spécialiste de la musique du Moyen-Âge, à proposer une histoire de la notation musicale aux élèves de son apparition à la Renaissance, comme introduction à l’atelier.
Les élèves ont ainsi pu voir des exemples des tout premiers systèmes très variés de notation, avant d’être invité.e.s à inventer le leur, à partir duquel elles/ils ont créé une partition collective qu’ils/elles ont essayé d’interpréter vocalement et avec quelques instruments mis à disposition par le plasticien Henri-Pierre Deroux pour l’instrumentarium de médiation de l’ensemble Sillages.

ressource complémentaire :
article ARS NOVA, la notation musicale facteur de modernité ?

MUSIQUE À L’IMAGE – élèves de 4ème

Atelier « Musique à l’image » réalisé avec les élèves de 4ème
© La Rocade

L’atelier “musique à l’image” vise à engager les élèves dans une réflexion sur les effets spectaculaires provoqués par la superposition de plusieurs langages faisant appel à des sens différents (la vue, l’ouïe, la conscience de l’espace).

Les élèves ont créé une bande-son pour une vidéo tirée d’un jeu vidéo de Wallace et Gromit en langue anglaise (1 à 2 min), en questionnant la rhétorique mise en place entre l’image, le son (musique, bruitage) et des textes présents dans les dialogues.
Les élèves ont réfléchi avec les intervenant.e.s à une mise en scène et une spatialisation de leur travail pour la captation. Ils ont été invités à expérimenter différentes façons de jouer avec ces superpositions et d’en critiquer les résultats.

Pour orienter le travail sonore, les élèves ont d’abord choisi un genre de film dont les codes musicaux traditionnels sont facilement identifiables (film d’horreur, film policier, comédie romantique), puis ils/elles ont travaillé la structure narrative de l’extrait visuel qui leur était proposé et ont cherché la meilleure manière de la traduire en structure musicale. Elles/ils se sont ensuite divisé.e.s par groupes (texte, bruitage, mélodies, musique d’ambiance, synchronisation) pour des moments d’improvisation et de recherche sonore. Enfin, les élèves se sont rassemblé.e.s et guidé.e.s par le groupe synchronisation, ont testé plusieurs solutions de superposition de leurs idées individuelles dans une partition de groupe, en interprétant eux/elles-mêmes les images qui défilaient devant elles/eux.

rédaction et médiation : Marie Bouchier